Plateforme

Depuis 2017, la MSH de Clermont-Ferrand est partenaire, aux côtés du Conseil départemental du Puy-de-Dôme, du projet de valorisation scientifique et culturelle « Gergovie et les sites arvernes ». La plateforme de géomatique IntelEspace en coordonne le volet archéologique et participe à la connaissance des réseaux de peuplement de la fin de l’Âge du fer à la fin de l’Antiquité dans le bassin clermontois au moyen de méthodes de détection non-invasives : imagerie multi-capteurs par drone (Lidar, multispectral et thermique), prospections géophysiques et prospections pédestres.

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Vue depuis le plateau de Gergovie / © Pictures Fabryc, CD63 - 2017

Par le biais d’une convention de collaboration scientifique et culturelle établie entre le Conseil départemental du Puy-de-Dôme (CD63) et l’Université Clermont Auvergne, la plateforme IntelEspace, plateforme de géomatique de la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, apporte son expertise scientifique et technique au projet « Gergovie et les sites arvernes », relevant du volet territorial Puy-de-Dôme d’un contrat de plan État – Région (2015-2020).

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Plateau de Gergovie / © Pictures Fabryc, CD63 - 2017

Depuis 2017, la plateforme gère notamment le traitement et l’interprétation des données Lidar acquises par le CD63 en 2016 sur le secteur « Gergovie-Gondole » (superficie de 57,5 km2) et l’élaboration d’un bilan documentaire couplé à un vaste programme de cartographie dynamique, de prospections au sol (Programme Agricola) et d’analyse spatiale ayant pour objectif d’orienter les stratégies de recherches archéologiques et paléoenvironnementales à venir.

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Plateau de Gergovie, Cast shadows / © E. Fovet, IntelEspace - MSH Clermont, 2017

Programme Agricola (2018-2020)

L’objectif du programme Agricola (2018-2020) était de caractériser le « Contexte archéologique des sites de Gergovie, Corent, Gondole (Puy-de-Dôme, France) de la Protohistoire récente à l’Antiquité tardive (fin IIe av. - Ve s. ap. J.-C.) ». Gergovie, Gondole et Corent sont 3 sites majeurs, géographiquement très proches, situés au cœur du territoire des Arvernes. La fenêtre d’étude s’étend ainsi sur environ14 km de côté et s’inscrit en bordure de la rivière Allier. Le début de la période d’étude a été placé au moment où l’occupation de Corent est la plus dense et précède le développement des oppida de Gondole et de Gergovie. À la fin de l’Antiquité, ces trois pôles sont abandonnés, parfois depuis plusieurs siècles. Entre ces deux bornes chronologiques, de nouveaux habitats groupés se sont développés en plaine et, avec eux, un ensemble d’habitats intercalaires.

Ce programme a nécessité la réalisation d’un bilan des données archéologiques disponibles et l’acquisition d’une nouvelle documentation par méthodes non invasives, en particulier des prospections pédestres, des prospections aériennes - par avion et par drone - et des prospections géophysiques. Ce travail a principalement porté sur quatre fenêtres d’étude, définies en concertation avec les différents acteurs de la recherche actuelle : (i) le plateau de Gergovie (La Roche-Blanche) ; (ii) l’intérieur de l’oppidumde Gondole (Le Cendre) ; (iii) le méandre de l’Allier aux Martres-de-Veyre ; (iv) la plaine de la Narse de La Sauvetat, en contrebas occidental du plateau de Corent.

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Fig. 1 : Utilisation d’un drone multi-capteurs pour la spatialisation des vestiges archéologiques sur le plateau de Gergovie. / © S. Chabert, MSH Clermont, 2019.

Les prospections pédestres ont permis de vérifier un certain nombre de données concernant la localisation, la datation et l’étendue des 20 sites sélectionnés pour l’étude. La géolocalisation des données de surface et une datation affinée du mobilier céramique permise par le renouvellement récent des connaissances des typologies des céramiques laténiennes et tardo-antiques ont dans plusieurs cas permis de conforter ou de rectifier la localisation et la chronologie des occupations. Pour certains sites, le croisement avec la photo-interprétation des photographies aériennes existantes a renseigné de façon plus précise l’organisation de l’occupation.

Dans la moitié méridionale de la fenêtre d’étude, sur la commune de La Sauvetat, l’acquisition de nouvelles données de surface croisée à la reprise des données anciennes des sites des Grosmeniers, de Pontary, de Mezel/les Communaux, de Lieu-Dieu et de la Font-Saint-Bonnet a permis de mieux cerner la datation de chacun de ces sites. Ces résultats doivent désormais être appréhendés ensemble afin de comprendre l’organisation du peuplement du secteur de la Narse et l’intensité de l’exploitation de cet espace humide, mise en lumière par les recherches paléoenvironnementales récentes (A. Mayoral, Geolab, UCA/CNRS - UMR 6042). Plus encore, l’occupation de la Narse de La Sauvetat doit être insérée dans une réflexion globale sur le peuplement de l’ensemble de ce secteur et mis en lien avec le site de Corent notamment, immédiatement à l’est et encore occupé durant l’Antiquité.

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Fig. 2 : Résultats des prospections au sol menées sur le plateau de Gergovie. Répartition du mobilier daté de la TD2b/période augustéenne. / © S. Chabert, MSH Clermont, 2020.

Si la plupart des sites appréhendés étaient déjà connus depuis plusieurs dizaines d’années, voire depuis le XIXe siècle, certains n’avaient jamais fait l’objet de prospections pédestres systématiques permettant de mieux caractériser la datation, la surface et l’organisation de leur occupation. Les recherches menées en 2019 et 2020 offrent ainsi pour la première fois une première proposition de l’évolution des occupations du plateau de Gergovie, des « camps césariens » (Orcet, La Roche-Blanche), de l’oppidum de Gondole et du site des Martres-de-Veyre.

À Gergovie, la prospection pédestre systématique engagée sur l’ensemble du plateau, couplée à la détection automatique des zones de terre observables (taupinières et sentiers) par drone muni d’un capteur multispectral (Fig. 1), a permis de montrer l’évolution de l’occupation entre le Néolithique et aujourd’hui. Les 13 000 objets archéologiques recueillis indiquent que les deux plus fortes occupations visibles se placent durant le Néolithique moyen puis durant La Tène D2b et l’époque augustéenne, la période antique étant très discrète et localisée et le Moyen Âge totalement absent (Fig. 2).

Conjointement à la caractérisation de l’occupation du plateau de Gergovie, les prospections pédestres menées sur l’emprise des camps césariens bâtis sur la butte de La Roche-Blanche (Petit Camp) et sur le plateau de la Serre d’Orcet (Grand Camp), n’ont livré que peu de mobilier relatif à une occupation laténienne du secteur, ce dernier n’étant réinvestit qu’à partir de la période médiévale, vraisemblablement dans le cadre de l’exploitation agricole des terres.

À Gondole, la parcelle occidentale située dans l’emprise de la fortification a pu être prospectée systématiquement pour la première fois (Fig. 3). Le terrain exploré, d’une surface de 10 ha, constitue près de la moitié de l’emprise supposée de l’oppidumintra-muros, estimée à 23 ha. Le vaste carroyage mis en place sur l’ensemble de la parcelle a permis une spatialisation relativement fine du mobilier ramassé, qui totalise près d’une tonne d’amphores et de céramiques principalement. L’occupation intra-muros se concentre durant la période de La Tène D2, à l’instar du quartier artisanal hors-les-murs (travaux de Y. Deberge, ARAFA/INRAP).

Aux Martres-de-Veyre, les découvertes anciennes des espaces funéraires laténiens et antiques, des ateliers artisanaux de céramique sigillée, de métallurgie et de meunerie ont conduit à interpréter ce site comme une agglomération antique. Une seule des deux vastes parcelles encore libres de toute construction pavillonnaire a pu faire l’objet d’une prospection étendue, avec géolocalisation du mobilier de surface. Deux occupations distinctes ont pu être mises en évidence, séparées par une vaste zone de vide. L’une, au nord de la parcelle, est la poursuite du site antique. Localisée en bordure septentrionale du champ, elle est circonscrite par une voie d’orientation est-ouest - aménagée à la fin de la période laténienne/augustéenne et utilisée durant le Haut-Empire - et la rivière Allier. L’étendue de cette occupation semble s’interrompre non loin de l’ancien village médiéval de Saint-Martial, à l’est, et témoigne vraisemblablement de l’existence d’un franchissement de la rivière en cet endroit. Dans la partie méridionale de la parcelle, une vaste occupation de La Tène D1 est matérialisée par une forte densité de fragments d’amphore qui doit être mise en relation avec le site du Bay, immédiatement au sud, occupé durant La Tène D1b (travaux de R. Lauranson, ArAr, UMR 5138 - Archéologie et Archéométrie).

L’ensemble de ces résultats doit maintenant être approfondi et intégré à une analyse spatiale plus large, propre à chacune des fenêtres d’étude ouvertes. Cette démarche nécessite un travail collectif, en collaboration avec les archéologues et chercheurs déjà investis sur certains de ces sites.

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Fig. 3 : Prospections au sol systématiques menées à l’intérieur de l’oppidum de Gondole. / © B. Dousteyssier, MSH Clermont, 2019.

Le programme Agricola a été dirigé par Bertrand Dousteyssier, ingénieur de recherche à la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand. Associant les compétences de 12 personnes émargeant dans différents instituts (Université Clermont Auvergne, CNRS, INRAP), il a permis le recrutement de Sandra Chabert durant 2 ans à la plateforme IntelEspace de la Maison des Sciences de Clermont en tant qu’ingénieure de recherche. Le financement du programme a été assuré par le Conseil départemental du Puy-de-Dôme, l’Université Clermont Auvergne, le Centre National de la Recherche Scientifique, la fondation de l’Université Clermont Auvergne (Chaire Arvernes 2.0) avec une contribution du Ministère de la Culture (DRAC Auvergne Rhône Alpes) et une collaboration de l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives.

Les membres de la plateforme IntelEspace qui ont participé au programme Agricola sont : Claire Brossard, Sandra Chabert, Zoé Chaboury, Marion Dacko, Bertrand Dousteyssier, Élise Fovet et Franck Vautier.

Recherches archéologiques sur les fortifications césariennes de la guerre des Gaules (2018-2021)

Sous la direction scientifique de Marion Dacko (MSH) et de Yann Deberge (Inrap), IntelEspace coordonne également un projet de recherche autorisé par le Ministère de la Culture et de la Communication (2018-2021) sur les camps romains installés devant l'oppidum de Gergovie à l'occasion du siège de 52 av. J.-C., au moyen d’un croisement expérimental de méthodes non invasives et de compétences scientifiques diversifiées :

  • Prospections géophysiques (responsables : G. Hulin, F.-X. Simon – Cellule géophysique de l'Inrap, Direction scientifique et technique, Métis - UMR 7619, Chrono-Environnement - UMR 6249), avec la collaboration du Laboratoire Magmas et Volcans - UMR 6524 CNRS / UMR 163 IRD / UCA).
  • Imagerie multi-capteurs par drone (Lidar, multispectral, thermique) (responsables : F. Vautier, E. Fovet, MSH – UAR 3550).
  • Phytoarchéologie et pédologie (responsables : M. Cabanis, G. Vernet, Inrap et Laboratoire Magmas et Volcans, avec la collaboration de M. Burst et A. Bonis - Geolab, - UMR 6042).

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Prospections multi-méthodes au pied de Gergovie / © IntelEspace - MSH Clermont, 2018-2020

Valorisation patrimoniale

La plateforme s’investit enfin dans le volet « valorisation » du projet « Gergovie et les sites arvernes » via la réalisation des contenus textuels et iconographiques pour les outils de médiation culturelle du plateau de Gergovie développés par le CD63. Elle a aussi collaboré à l’élaboration du contenu scientifique et audiovisuel du Musée Archéologique de la Bataille de Gergovie, qui a ouvert ses portes sur le Plateau, le 19 octobre 2020. Un partenariat entre le Musée Archéologique de la Bataille de Gergovie, le Département du Puy-de-Dôme et la Maison des Sciences de l'Homme de Clermont-Ferrand a également donné naissance à un cycle de quatre conférences par an autour de l’archéologie et de l’histoire du territoire arverne, au regard des travaux scientifiques récents : Echos d’Archéos.

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1. Musée Archéologique de la Bataille de Gergovie / © Pictures Fabryc, CD63 - 2019
2. Évocation du rempart de l'oppidum de Gergovie / © CD63, 2020 - dessin : Yoann Bit Monnot DPLG - cliché : PicturesFabryc
3. Conférence #1 d'Échos d'Archéos / Illustration : G. Pissondes

Les recherches archéologiques menées dans le cadre du projet « Gergovie et les sites arvernes » ont donné l’impulsion à la création, aux Presses Universitaires Blaise Pascal, d’une nouvelle collection, dédiée à l’archéologie : Terra Mater. Dirigée par Bertrand Dousteyssier, archéologue, ingénieur de recherche à la plateforme IntelEspace, elle a été lancée le 27 juin 2019 avec la publication de deux ouvrages, Les Fortifications de l’oppidum de Gergovie et Sépultures de chevaux devant Gergovie.

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Les membres de la plateforme IntelEspace qui participent ou ont participé au projet « Gergovie et les sites arvernes » sont les suivants : Claire Brossard, Sandra Chabert, Zoé Chaboury, MarionDacko, Bertrand Dousteyssier, Élise Fovet, Borbála Hortobágyi, Camille Lucas, Arthur Messerli et Franck Vautier.