Montreurs de curiosités

Responsables scientifiques : Philippe Bourdin (PR Histoire) et Aurelia Vasile (ingénieur d’études)
Laboratoires associés : CHEC, MSH
Disciplines : Histoire, Histoire de l’art, Humanités numériques
Inscription dans les axes scientifiques de la MSH : « Rupture, Révolutions, Innovation »
Durée du projet : 24 mois

Ce projet de recherche participative s’inscrit dans le champ de l’histoire des spectacles forains et de curiosités (montreurs d’optique, de marionnettes, de cires, dresseurs, jongleurs, acrobates, prestidigitateurs, etc.) de la fin du XVIIIe siècle jusqu’à la fin du XIXe. Il prend la suite des travaux sur le théâtre provincial engagés dans le cadre du Centre d’Histoire « Espaces & Cultures » et de la MSH de Clermont-Ferrand (UAR 3550)[1]. Les deux formes de représentation sont indissociables, quelles que soient les lois qui, depuis le Premier empire, tentent de les distinguer : leur art, leurs thématiques, leur intrication dans un même numéro sont des constantes, et l’échec relatif des entrepreneurs des comédies provinciales a pour corollaire au XIXe siècle un appel de plus en plus fréquent aux montreurs de curiosités ou une dénonciation de plus en plus vive de leur concurrence. Les curiosités sont révélatrices et de manières ancestrales de jouer de son corps et des croyances des spectateurs (ou de leur naïveté, de leurs émotions), et d’une manière de voir et de dire le monde (les limites de l’humanité et de l’animalité, les ailleurs oniriques, l’histoire en marche, la reconquête religieuse des esprits, etc.). C’est une rencontre avec des publics très divers, parfois très populaires, et avec des artistes qui ont majoritairement vécu dans l’anonymat, quelles que soient les tournées de quelques-uns rendus célèbres. C’est aussi une promenade dans des lieux de représentation qui vont de la rue au scènes municipales ou privées, de la maison particulière à l’auberge ou au cabaret.

À travers les archives de police, les journaux, les registres de garnis et de passeports, il s’agit de retrouver quantité d’artistes itinérants spécialisés dans les curiosités, ou de vérifier l’imprégnation entre le théâtre et celles-ci. Les résultats de ces enquêtes nourrissent la base de données https://spectacle-de-curiosites.msh.uca.fr/ Celle-ci permet d’une part d’additionner des caractéristiques individuelles (jusqu’aux caractéristiques physiques des saltimbanques, afin de vérifier la corrélation entre différents facteurs : période de guerre, mutilations, évolution en conséquence de la pratique du métier), d’autre part d’interroger par période et espace géographique les tournées artistiques. L’idée est aussi d’aller plus loin dans la compréhension des spectacles, non seulement en comprenant leur contenu (sur lequel, par exemple, les transparents des lanternes magiques, s’avère des plus évocateurs tant sur l’évolution technique des supports que sur la transmission qu’ils assurent), mais encore en les rapportant aux mentalités et à l’état culturel des espaces considérés, parcourus ou non par le colportage, sensibles ou non à la caricature, à la presse, au livre, modelés différemment par un univers onirique (selon, par exemple, que l’on habite la montagne ou les rives océanes), soumis plus ou moins aux soubresauts politiques, etc. En bref, il s’agit de nourrir une réflexion scientifique et d’intérêt patrimonial sur l’histoire sociale et culturelle de la France aux XVIIIe et au XIXe siècles grâce à une observation par en bas des phénomènes sociaux et de mobilité.

Lauréat de l'appel à projets simplifié 2024, ce programme est soutenu financièrement par la MSH de Clermont-Ferrand et de l'institut des Lettres Langues Sciences Humaines et Sociales de l'Université Clermont-Auvergne.