DAM 2

DAM 2
Entre volcanisme, dynamique fluviale, climat et anthropisation : enseignements des archives sédimentaires sur l’histoire pléistocène et holocène des interactions homme / milieu aux têtes des bassins de la Loire, de l’Ardèche et de l’Eyrieux.

Résumé : Les confins vivaro-vellaves posent, à l’échelle micro-régionale, des questions thématiquement, spatialement et chronologiquement imbriquées touchant à l’histoire géomorphologique, environnementale et humaine, que le projet DAM a été ici le premier à aborder dans leurs interrelations. Le projet DAM-2 vise à poursuivre le travail engagé, autour de deux axes complémentaires :

Axe 1 : Reconstituer le contexte environnemental de l’occupation humaine paléolithique des confins altiligériens et ardéchois et l’histoire des interactions volcanisme / dynamique fluviale au cours du Pléistocène moyen et supérieur. Contribuer ainsi à l’affinement de la connaissance du contexte de volcanisme actif (par le biais de la téphrostratigraphie et de la géochronologie) et à la réflexion sur la relation homme / milieu en lien avec l’occupation de ces territoires chevauchant plaine et montagne par Néanderthal puis par l’Homme moderne.

Axe 2 : Caractériser l’évolution des fonds de vallées au cours du Tardiglaciaire et de l’Holocène sous l’angle des flux hydro-sédimentaires (phases de stockage et de déstockage) et des fluctuations du contexte environnemental et morpho-paysager, et évaluer la part des forçages ayant contrôlé ces évolutions (rôle du climat ; rôle des sociétés). Contribuer ainsi, par la reconstitution de l’histoire des têtes de bassin sous l’angle de la géoarchéologie (ajustements société / environnement), à la réflexion sur la gestion actuelle et à venir des milieux en tenant compte des enseignements des évolutions passées et du poids des héritages qui leur sont liés dans le fonctionnement actuel de ces milieux (en particulier incidences en termes de biodiversité, de services écosystémiques et de risques hydrologiques).

Porteur : Emmanuelle Defive (UMR GEOLAB). Partenaires : UMR LPC, IN2P3
Disciplines : Géomorphologie, géoarchéologie, géochronologie, paléoécologie, géomatique, histoire et archéologie

Focus : Campagne de carottage à 100 mètres de profondeur au Lac d’Issarlès (septembre 2020) !

Depuis plusieurs années, des recherches sont conduites dans le haut bassin de la Loire et ses marges rhodaniennes (haute Ardèche, Eyrieux) pour reconstituer l’histoire des fluctuations environnementales, paysagères et des relations sociétés-milieu à diverses échelles historiques : celle de l’Holocène, soit les 10 derniers milliers d’années, celle plus longue du Pléistocène moyen et supérieur, soit les 200 à 300 derniers milliers d’années. A l’échelle du Pléistocène moyen et supérieur, ce secteur a connu une activité volcanique sub-contemporaine de celle de la Chaîne des Puys – notamment, les jeunes volcans d’Ardèche, ou le volcanisme du Bas Vivarais, datant de 200 000 à 15 000 ans environ - à l’origine d’édifices dispersés sur les hautes terres et dans les vallées. L’activité volcanique a perturbé les environnements, et laissé des traces à l’échelle régionale sous la forme de retombées volcaniques (les téphras) que l’on retrouve dans les lacs et divers sites d’habitat préhistorique. La question de la confrontation des groupes préhistoriques à ces manifestations spectaculaires des dynamiques naturelles suscite d’autant plus l’intérêt que, d’une part, des discussions existent sur la représentation de manifestations éruptives sur les parois de la grotte Chauvet-Pont d’Arc, et que, d’autre part, cette activité volcanique survient en phase avec la présence de Néandertal puis du passage progressif à l’Homme moderne.

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© Hubert-Marie PITEUX

Dans ce contexte, il apparaît nécessaire de mesurer l’importance des bouleversements induits sur l’environnement proche et plus lointain de ce volcanisme, et d’établir une échelle téphrostratigraphique micro-régionale de référence qui n’existe pas dans cette partie du Massif central. Le Lac d’Issarlès - dont l’âge, inconnu jusqu’à ce jour, vient d’être estimé entre 50 et 60 000 ans par Didier Miallier et Thierry Pilleyre, spécialistes de datation par thermoluminscence du Laboratoire de Physique de Clermont-Ferrand, engagés dans cette recherche - offre un très intéressant piège à sédiments à même de permettre de travailler à ces reconstitutions à l’échelle des cinquante derniers millénaires. Le carottage réalisé du 28 au 30 septembre 2020 fait suite à une campagne de prospection bathymétrique qui a alimenté la réalisation du mémoire de Master 2 de Victor Arricau (Université Toulouse 2), dirigé par Emmanuel Chapron du laboratoire GEODE. Ce travail a confirmé le potentiel de ce site où les archives sédimentaires sont bien conservées. Plusieurs glissements de terrain ont été mis en évidence dans la séquence sédimentaire, qui laissent ainsi également espérer la reconstruction d’une histoire locale à régionale de la paléosismicité, d’origine tectonique, et/ou volcanique ; un sujet supplémentaire d'intérêt alors que de sérieuses questions se posent à la suite du tout récent séisme du Teil, qui a été ressenti jusque dans ce secteur.

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© Hubert-Marie PITEUX

Ces recherches pilotées par Emmanuelle Defive, du laboratoire GEOLAB, sont conduites dans le cadre des programmes DAM et DAM2, financés par la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, et du programme CoEVOL, qui bénéficie de financement de la part du Géoparc Mondial UNESCO des Monts d’Ardèche et du Parc naturel régional des Monts d’Ardèche. Elles fédèrent des chercheurs aux spécialités complémentaires, de diverses universités et laboratoires, dans l’optique d’une approche transdisciplinaire. Sont ainsi principalement engagés dans ce projet :

- Jean-Paul Raynal : DR émérite CNRS, laboratoire PACEA Bordeaux, géologue et préhistorien,
- Emmanuel Chapron : PR Université Toulouse Jean Jaurès et laboratoire GEODE, spécialiste de sédimentologie lacustre,
- Yannick Miras : IR CNRS, HNHP - Histoire Naturelle de l’Homme Préhistorique (UMR 7194), CNRS/MNHN/UPVD, Institut de Paléontologie Humaine palynologue et archéobotaniste,
- Didier Miallier (PR) et Thierry Pilleyre (MCF) du LPC (Université Clermont Auvergne), spécialistes de datation par thermoluminescence
- Gwénolé Jouannic, enseignant agrégé, géologue spécialiste des téphras.

L’opération de carottage a mobilisé le bureau d’études clermontois Athos Environnement dont le directeur, Antoine Thouvenot, collabore régulièrement aux recherches conduites sur les lacs du Massif central.

Il faut enfin souligner l’engagement du milieu associatif (en particulier Les Amis du Mézenc, et l’Archéo-Logis/CDERAD) et des élus (mairies de Rieutord, du Lac d’Issarlès, de Borée) dans le soutien à ces recherches, pour le financement de gratifications de stage master, l’acquisition de couvertures LiDAR, l’hébergement d’étudiants et/ou de chercheurs. Les chercheurs ont pour habitude de faire retour de cette aide sous la forme de conférences, balades guidées, articles de vulgarisation dans les revues locales, émissions de radio, expositions.

Le travail engagé au Lac d’Issarlès devrait se poursuivre par l’analyse des carottes prélevées.

Pour lire la revue de presse consacrée à cette campagne de carottage : Cliquez !