Colloque « Déplacés, exilés » : appel à communication

Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, l’Europe fait face à un double défi. D’une part, elle doit retrouver la paix et se reconstruire. D’autre part, elle est confrontée au déplacement et à l’exil de millions de personnes à cause de la guerre et de la Shoah. S’y ajoutent et s’entremêlent, dans les décennies suivantes, les mouvements de population dus à la décolonisation et aux conflits violents qui l’accompagnent, qui regroupent ceux que l’historienne Andrea Smith qualifie d’« invisibles migrants ». Depuis, l’Europe ne cesse d’être « en mouvement » pour reprendre une formule du sociologue Eugen Kulischer, lui-même réfugié juif d’origine russe arrivé aux États-Unis en 1941. Pensons aux boat-people dans les années 1970, aux personnes déplacées lors des guerres en Yougoslavie dans les années 1990, ou plus récemment aux réfugiés ukrainiens. Au XXIe siècle, l’Europe continue en effet d’être confrontée à des déplacements de populations. Elle doit même relever un véritable défi depuis presque dix ans maintenant : pour la seule année 2015, c’est un million de personnes qui traversent la Méditerranée en direction de ce qu’Aleida Assmann a nommé le « rêve européen ».

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Le colloque « Déplacés, exilés » qui se tiendra à Clermont-Ferrand du 25 au 27 novembre 2024, permettra de s’interroger sur le rôle des populations déplacées et exilées dans la construction européenne, qu’elles viennent de pays européens ou d’autres régions du monde. Dans une approche résolument pluridisciplinaire, cette enquête portera tout particulièrement sur la période qui s’ouvre avec la guerre d’Espagne et les prémices de la Seconde Guerre mondiale, sans pour autant exclure de porter des éclairages sur les périodes antérieures. La question centrale du colloque sera de déterminer comment ces acteurs et actrices ont pensé et/ou fait l’Europe : comment les exilé.es et déplacé.es ont contribué à la construction de l’Europe, ou au contraire à sa mise en défaut. Nous nous intéresserons aux expériences faites par ces populations des conflits, des violences et des dispositifs

de contrôle européens, soit aux ressources mobilisées, aux usages, aux représentations, et aux énoncés qui dessinent cette Europe en mouvement.

Par ce biais, nous cherchons à interroger non seulement ce qu’est et veut être l’Europe, mais également la mise à l’épreuve de sa dynamique transnationale et de sa capacité à respecter les normes et valeurs qu’elle affirme, particulièrement les droits humains, dont témoigne par l’exemple la récente panthéonisation des époux Manouchian en France. Ainsi, nous souhaitons confronter l’Europe à son histoire et à sa mémoire. Le colloque s’inscrit dans la continuité des travaux qui la saisissent au prisme de ces mouvements multiples, tels que Europe on the Move d’Eugen Kulischer, Europa in Bewegung de Klaus Bade, et plus récemment Der Europäische Traum d’Aleida Assmann et The Great Migration de Peter Gatrell. Trois thématiques seront privilégiées : les reconfigurations spatiales, l’expérience des cadres réglementaires, et les représentations de l’Europe à l’épreuve des exils et des déplacements de population.

Le colloque s’inscrit dans le cadre des commémorations que l’Université Clermont Auvergne organise chaque année en mémoire des victimes de la rafle ayant eu lieu à Clermont-Ferrand le 25 novembre 1943. En ce 85e anniversaire de l’arrivée de l’Université de Strasbourg à Clermont-Ferrand et du 80e anniversaire du retour des Strasbourgeois de Clermont-Ferrand en Alsace, sa thématique a une symbolique toute particulière.

Karine RANCE (maîtresse de conférences en histoire contemporaine, UCA), Bettina SEVERIN- BARBOUTIE (professeure en histoire contemporaine, UCA), Cécilia BRASSIER (maîtresse de conférences en SIC, UCA), Olivia SALMON MONVIOLA (maîtresse de conférences en études espagnoles, UCA)
 

Laura CALABRESE (Université Libre de Bruxelles, Belgique), Dorota DAKOWSKA (Science Po, Aix en Provence), Corine DEFRANCE (CNRS, Paris 1-Panthéon Sorbonne), Karim FERTIKH (Science Po Strasbourg), Oscar FREÁN-HERNANÁNDEZ (Université de Lyon 2), Esther Möller (Centre Marc Bloch, Berlin), Ségolène PLYER (Université de Strasbourg), Brian SHAEV (Leiden University), Lina VENTURAS (Panteion University, Athènes)

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